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Prêts octroyés par des sociétés de capitaux à des personnes qui y détiennent une participation

1 Principe de neutralité fiscale

Toute société constituée sous la forme d’une personne morale a la jouissance des droits civils et, partant, la capacité de conclure des contrats de prêt. Ce type de contrat ne nécessite pas impérativement d’être conclu avec un tiers indépendant pour être valable. Une société peut également octroyer un prêt à des personnes détenant des actions ou des parts sociales en son sein. Elle inscrit alors le prêt correspondant à l’actif de son bilan. La personne détenant la participation (ou personne associée) doit rembourser le montant du prêt et s’acquitter des intérêts qui y sont liés. 

Un prêt consenti et exécuté à des conditions usuelles pour des opérations réalisées entre tiers indépendants constitue une restructuration de patrimoine sans incidence fiscale, tant pour la société que pour la personne détenant la participation.

2 Prestations appréciables en argent liées à des prêts octroyés

Si une société exécute ou consent un prêt à une personne y détenant une participation à des conditions différentes que s’il était accordé à un tiers indépendant, la personne en question peut se trouver favorisée et la somme correspondante est alors soustraite à la société. Ce type de cas n’équivaut pas à une restructuration de patrimoine sans incidence fiscale. Il y a au contraire lieu d’examiner s’il s’agit de distributions dissimulées de bénéfice reposant sur le rapport de participation. Pour les personnes détenant une participation, de telles distributions de bénéfice sont imposables au titre de prestations appréciables en argent. L’examen des prestations appréciables en argent versées à des personnes physiques et pouvant découler de prêts octroyés se fonde sur les critères présentés ci-après. L’évaluation des prêts intragroupes est soumise à d’autres critères. 

Il convient en premier lieu de vérifier si le prêt aurait été accordé aux mêmes conditions à un tiers indépendant afin de déterminer si, et le cas échéant dans quelle mesure, un prêt octroyé engendre des prestations appréciables en argent. Il y a lieu ce faisant d’adopter la perspective de la société, les intérêts de la personne associée n’étant pas déterminants. Les conditions du prêt doivent être comparables à celles d’un prêt consenti à un tiers indépendant, aussi bien à l’octroi du prêt que pendant toute sa durée et au moment d’un éventuel amortissement.

2.1 Conformité avec les conditions pratiquées pour des tiers à l’octroi du prêt

Dans la période fiscale de l’octroi du prêt à une personne détenant une participation dans la société, la comparaison entre les conditions accordées et celles habituellement pratiquées pour des tiers indépendants s’appuie sur les critères déterminants ci-après, qui doivent en principe être remplis de manière cumulative :

  • Solvabilité de la personne détenant une participation: la situation patrimoniale et le revenu de la personne détenant une participation doivent lui permettre de s’acquitter des amortissements et intérêts convenus, compte tenu du coût de la vie. Dans le cadre de l’examen de la solvabilité, la participation à la société octroyant le prêt est également prise en compte dans la fortune et les réserves de cette société pouvant être distribuées sont intégrées dans le revenu.

  • Absence de répercussion néfaste sur les liquidités et la structure du bilan de la société: l’octroi du prêt ne doit entraîner aucun problème de liquidités pour la société et le montant du prêt par rapport au total du bilan ne doit pas représenter de gros risque pour la société, risque qu’une société indépendante n’aurait pas pris.

  • Existence d’un contrat de prêt: le contrat de prêt atteste de la volonté de remboursement de la personne détenant une participation. Il fixe des conditions conformes au marché en matière d’amortissement, d’intérêts et de garantie du prêt, et définit une option de résiliation appropriée pour le prêteur. Si la personne détenant la participation répond aux conditions de solvabilité et si l’octroi du prêt n’a pas de répercussion néfaste sur le bilan, l’Intendance des impôts peut renoncer à demander un contrat de prêt, lequel peut toutefois être exigé ultérieurement en cas de changement de situation.

Les mêmes critères s’appliquent lors de l’examen réalisé en cas d’augmentation d’un prêt existant. Est également considéré comme augmentation le fait que les intérêts d’un prêt existant ne sont pas réglés par la personne détenant une participation, mais imputés à la dette du prêt.

Lors de son examen, l’Intendance des impôts n’a pas vocation à déterminer si l’octroi d’un prêt enfreint l’interdiction de restitution des versements prévue par le droit des sociétés.

2.2 Conformité avec les conditions pratiquées pour des tiers pendant la durée du prêt

Pendant toute la durée du prêt, l’amortissement et la rémunération dudit prêt doivent être conformes aux dispositions du contrat pour chaque période fiscale ou être réalisés dans des conditions similaires à celles pratiquées pour des tiers indépendants. En principe, le taux d’intérêt ne doit pas être inférieur au taux minimal fixé dans la lettre-circulaire de l’Administration fédérale des contributions relative aux taux d’intérêt admis fiscalement sur les avances ou les prêts, actualisée chaque année. Il est possible d’apporter des modifications au contrat, dans la mesure où les conditions appliquées dans ce cadre le seraient également avec des tiers indépendants (p. ex. les amortissements anticipés ou la suspension temporaire d’un amortissement sont autorisés dans des situations justifiées).

2.3 Conformité avec les conditions pratiquées pour des tiers en cas d’amortissement du prêt

La nécessité de l’amortissement est déterminée par le droit commercial. L’amortissement du prêt n’est justifié par l’usage commercial que si la personne détenant la participation est devenue insolvable, de sorte que l’on ne peut plus compter sur le remboursement du prêt.

2.4 Conséquences fiscales en cas de prêts non conformes aux conditions pratiquées pour des tiers

Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, des prestations appréciables en argent liées à un prêt sont imposées si la volonté de remboursement fait défaut ou s’il est constaté qu’on ne peut raisonnablement compter sur le remboursement du prêt, ce qui indique un prêt dit fictif ou simulé. Il convient de considérer les circonstances dans leur ensemble pour déterminer l’absence de volonté de rembourser tout comme l’improbabilité du remboursement. Si l’un ou l’autre de ces éléments ressortent des circonstances, l’octroi du prêt à des conditions non conformes à celles pratiquées pour des tiers entrainera les conséquences fiscales décrites ci-après. Si aucune correction fiscale du prêt n’est opérée dans le bilan commercial et que la personne détenant la participation procède par la suite à des paiements d’amortissement et d’intérêts, ces versements seront considérés comme des apports de capital pour la société.

2.4.1 À l’octroi ou à l’augmentation du prêt

Le prêt octroyé est décomptabilisé dans le bilan fiscal de la société par le biais de la constitution d’une réserve négative, et ce, sans incidence sur le résultat. La personne détenant la participation est imposée sur le montant du prêt au titre de prestation appréciable en argent et ne peut pas déduire fiscalement la dette du prêt.

Si le prêt est fondamentalement reconnu sous l’angle fiscal, mais que son montant ne correspond pas à celui d’un prêt qui serait accordé à un tiers indépendant, une correction fiscale du prêt est opérée uniquement à hauteur de la part excédentaire.

2.4.2 Pendant la durée du prêt

Si le prêt octroyé n’est pas amorti ou rémunéré conformément aux dispositions du contrat ou aux conditions applicables à des tiers indépendants, une réserve négative est constituée dans le bilan fiscal de la société à hauteur de l’amortissement non réglé pour la période fiscale correspondante, et la rémunération insuffisante est comptabilisée dans le bénéfice imposable de la société. La personne détenant la participation doit déclarer l’amortissement et la rémunération non réglés comme prestation appréciable en argent et peut retirer le montant de la réserve négative de la déduction fiscale relative à la dette du prêt.

2.4.3 En cas d’amortissement du prêt

L’amortissement intégral ou partiel de la créance résultant du prêt exprime la volonté claire et reconnaissable de la personne détenant la participation de soustraire le montant du prêt correspondant à la société de manière définitive. L’amortissement est dès lors comptabilisé dans le bénéfice imposable de la société. La personne détenant la participation doit déclarer une prestation appréciable en argent correspondante dans la période fiscale de l’amortissement, dans la mesure où le prêt n’a pas été décomptabilisé dans le bilan fiscal par la constitution d’une réserve négative au cours des périodes précédentes et où une prestation appréciable en argent correspondante n’a pas déjà été déclarée par la personne détenant la participation. 

La réintégration dans le bénéfice de la société et la déclaration de la prestation appréciable en argent par la personne détenant une participation ne peuvent être évitées que si la société prouve que l’amortissement du prêt octroyé a été rendu nécessaire du fait de l’insolvabilité de la personne détenant la participation, qui était initialement solvable. Elle doit pour cela montrer qu’elle a accompli des efforts sérieux en matière de recouvrement ou de garantie face à la détérioration prévisible de la solvabilité de la personne associée. Dans ce cas, l’amortissement est considéré comme justifié par l’usage commercial.

2.5 Prêts octroyés à une personne proche

Une personne détenant une participation dans une société peut également recevoir des prestations appréciables en argent liées à un prêt, même si le prêt en question a été accordé, non pas à elle, mais à une personne qui lui est proche, par exemple son conjoint ou sa conjointe, une personne parente ou une autre société qu’elle contrôle. Si ce prêt ne répond pas aux conditions usuelles appliquées à des tiers indépendants, le lien doit être établi avec le rapport de participation de la personne associée. Celle-ci réalise, dans les conditions susmentionnées, des prestations appréciables en argent, qu’elle verse sous forme de donation à la personne proche ou sous forme d’apport dissimulé de capital à son autre société ayant reçu le prêt.

2.6 Évaluation des avoirs de compte courant

Si une société présente un avoir de compte courant vis-à-vis d’une personne détenant une participation dans cette même société, ou si un avoir de compte courant est continuellement augmenté, cet avoir est soumis à une appréciation fiscale conformément aux explications ci-dessus concernant les prêts octroyés.


Version du 7 nov. 2024

 

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